Le monde tel qu’il se donne semble avoir peu de sens. La première tâche que nous devrions nous assigner pourrait être d’élucider ce mystère qui inaugure toutes les formes de la réflexion moderne, mais ce serait se fourvoyer. Par ailleurs, il y a une grande difficulté à supposer que l’on puisse reformuler la question des fondements d’un point de vue critique. On pourrait penser qu’il s’agit là d’une nouvelle tentative de la philosophie de penser au mieux un nouveau système ou au moins une approche critique de la philosophie de l’histoire. Or, il n’en est rien. Et les difficultés sont nombreuses pour expliquer ce fait, car cela revient en apparence à scier la branche sur laquelle on est assis ou à quitter un train en marche. Le premier obstacle vient donc de la peur ou de la difficulté à quitter des habitudes de pensées coutumiers que l’on est de tirer des conclusions consubstantielles à la nature même des objets que nous manipulons dans la théorie de la connaissance. Il y a là une nouveauté fondamentale que l’on peut esquisser et à laquelle nous consacrerons un moment important : la clôture de l’objet. La clôture de l’objet suppose que nous fabriquons des objets de la connaissance dont la nature tient à un repli de cet objet sur lui-même que l’on établit par une logique de relations qui ne suppose pas l’objet pensable autrement qu’à partir de lui-même. L’objet s’explique par les conditions de sa propre objectivité supposée qui ne suppose pas la connaissance de cet objet c’est-à-dire les conditions de son engendrement. Autrement dit les objets de la théorie de la connaissance sont autoréférents ce qui veut dire définis comme objet pensé à partir de ces relations qui constituent une forme illusoire de la pensée qui peut être véhiculé par le discours. Il en va ainsi d’une forme de la philosophie qui s’est appauvrie de la nécessité d’une théorie de la connaissance ce qui veut dire posséder une théorie des sciences inscriptible dans une pédagogie du savoir ce à quoi elle à renoncer pour des raisons de contingences historiques liées au commerce des idées simples. C’est un peu comme si la pensée s’était effondrée sur elle-même tant la logique des objets s’est repliée sur le sujet lui-même pour redéfinir un complexe sujet-objet qui serait le cœur de la pensée. Cette question au cœur de la philosophie kantienne ne devrait pas nous faire renoncer à trouver une architectonique de la raison, car bien que les sciences progressent dans la diversité, paradoxalement, elles s’éloignent de l’unité constitutive de la pensée en prenant l’ombre pour la proie. De ce point de vue, la trame kantienne reste la première mise à l’épreuve du système de la raison et nous reviendrons sur ce qui reste de la possibilité de décrire les objets et leurs conditions de possibilité qui peut être en apparence une pierre d’achoppement de la théorie kantienne, car on pourrait croire que les connaissances scientifiques de l’espace et du temps rendent aujourd’hui caduques la possibilité de représentation des objets. Or, c’est là la tâche la plus difficile de notre entreprise qui vise à trouver une voie critique dans une théorie de la connaissance de nos connaissances, ce que l’on appelait autrefois une science de la science, pour échapper à ce qui est aujourd’hui un axiome de la clôture de la théorie des objets qui sonne comme une trahison de l’ontologie. Les objets sont ce qu’ils sont parce que comme ils sont, ils existent. Ce qui sonne comme une forme d’aberration du rationalisme, car on suppose que l’interprétation n’a pas besoin de sens. Autrement dit, on pourrait passer en revue les travers de la pensée commune dans théorie de la connaissance, on verrait qu’y cohabite les confusions de plans, les contradictions et les abus de langage ce qui constitue une déclinaison de la perversion de la notion d’objet de la science. Qu’est-ce que cela signifie? Que nous dissolvons nos propres conditions d’existences dans la satisfaction que procure l’explication hâtive et rassurante qui nous amène à produire du réel contre la réalité, des objets contre des objets, du sens comme de l’insensé et des interprétions qui n’interprètent pas, mais se joue des objets. A cela deux raisons ; la première, contrairement à ce que nous pensons tient au fait que le monde tel que nous le posons est loin des principes fondamentaux de la raison, la deuxième, conséquence de la première, est que ce monde n’est pas construit comme nous le supposons, car ce que nous supposons ne permet pas d’en construire une représentions acceptable ou pertinente sauf à croire que réfléchir est le produit intrinsèque inhérent ces objets que nous fabriquons, c’est un peu comme si un homme obèse, doté d’un gros ventre, supposait que la marche vienne de ce ventre dans l’impossibilité qu’il est de voir ses pieds. Ainsi, sommes-nous parvenus à ce point où il semblerait que ce que nous pensions et la manière dont nous le pensons ne soient plus à même de conduire notre marche comme si cela avait été le cas d’ailleurs. Il n’y a pas lieu de s’arrêter sur les critiques contemporaines qui n’ont aucune portée philosophique, car elles ont emprunté les chemins de traverse d’une forme pervertie de la raison. Or, l’essentiel de notre propos a été durant ces années d’enseignement de reformuler les enjeux d’une théorie de la connaissance, ce qui signifiait interroger les fondements de ce que nous considérons comme une forme de l’objectivité, entendu comme notre capacité à produire des objets. Il y a d’emblée une grande difficulté à supposer ici l’existence d’objets de la connaissance alors que l’esprit de ce texte visera à construire bien avant, une ouverture d’un autre type à leur interprétation. Pour autant, et c’est là un paradoxe de l’approche commune, il y a en apparence des objets de la connaissance qui semble mieux construite localement notamment dans certains domaines de la physique théorique ou des mathématiques. Pour autant, nous montrerons qu’il ne faut pas se méprendre si certains autres objets de la connaissance semblent parfois éloignés de la science, mais en prenne la forme, cela provient d’une nécessité aujourd’hui naturelle chez l’homme de justifier une vie de l’esprit qu’il ne possède pas nécessairement, car cette vie de l’esprit n’a rien de naturel dans la construction de nos objets, on pourrait même dire que certains font abstraction de la question du sens . Autrement dit, on peut procéder pour justifier un objet à une interprétation mécanique, contraire à la raison, dénuée de fondement dont la pertinence tiendra à un habillage rationnel par une juxtaposition fragile de raisonnements peu pertinents, mais qui a l‘avantage de donner une illusoire consistance, rassurante et efficace à cet objet. Problème qui lorsqu’il est mal posé, a pris le nom de problème d’interprétation. Car il nous faut reconnaitre que l’éloignement de principes fondamentaux nous amène à nous pencher le plus couramment sur des problèmes qui n’en sont pas. C’est là une chose rassurante qui ne serait être confondu avec une prétention toute philosophique, mais force est de constater que ce n’est pas le monde qui n’a pas de sens, mais l’interprétation que nous en donnons sur des objets construit par défaut. C’est là une chose inhérente à la construction même de ce que nous appelons l’histoire des idées qui bien que nécessaire, ne correspond à aucune idée et qui a pris corps dans un certain nombre d’objets de la théorie de la connaissance. Or, il y a une limite intellectuelle à l’histoire des idées : elle ne donne pas d’idée de l’idée, car elle est d’une autre nature Ce que nous pourrions dire autrement en supposant que le lecteur admette pour l’heure que peut-être il n’y a rien dans ce qui nous est proposé sous cette forme première de ce qui serait la nature des choses. Une forme d’absurdité qui mobilise notre attention et nous détourne du bon sens. Là encore c’est un problème pédagogique : on n’apprend pas à penser d’où cette idée moderne que l’empilement des connaissances produit des objets ce qui se mesure dans la science économique ou la science du droit où l‘on ne trouve pas trace de l‘usage de la raison, mais une clôture de l‘objet qui se tient à l‘écart de la question des fondements ; on peut en l‘occurrence supposer que les critères de détermination de ces sciences n‘ont pas encore gagné le terrain de ce que l‘on appelait autrefois l‘universalité de la raison. C’est certainement pour cela que l’on souscrit à ces objets simples qui évitent de poser le problème des fins comme capable de défaire l’économie ou le droit d’un réel qui n’en est pas un. Nous reviendrons sur cette question qui doit mettre sur le même plan les sciences dans la production des objets. Aussi, faut-il s’interroger afin d’éviter les faux problèmes, c’est-à-dire la plupart des objets qui nous sont proposés en première instance et n’accepter de faire porter sa réflexion que sur des objets fondés sur une connaissance et non sur un discours. Ce qui veut dire revenir pour le moins à la construction des concepts contre les usages du discours. Le lecteur trouvera en apparence une critique radicale dans ce projet de refondation, mais tel n’est pas le cas. En revanche, il est un moyen de cimenter la connaissance en redonnant place à cette idée qu’on appelait universalité de la raison qui correspond à notre sens à une forme de la vie de l’esprit. Cela revient au point de vue de la méthode à interroger les phénomènes dans une perspective que l’on appellerait phénoménologique : qui tient à l’étude des phénomènes. Ce qui veut dire tourner le dos à la seule question du vocabulaire dans laquelle serait contenue l’idée, mais bien poser les choses par nature, ce que Kant appelait le divers pur. L’idée ne peut se réduire au seul usage du jeu des mots ou du discours et contourne la question du silence ou de ce qui est avant le langage. Le problème semble s’obscurcir dans cette présentation qui tente de poser un point de rebroussement dans la théorie de la connaissance, mais ce n’est là encore une fois qu’une apparence issue de l’impression diffuse ou de la défiance liée à la dérobade du sol dur de la référence entendue, établie, coutumière. Le point que nous devons gagner passe par le renoncement des acquis des objets qui sont autant de leurres de la réflexion construits sur l’asservissement de ces objets aux contraintes de nos représentations erronées, car nous ne nous connaissons pas et avons renoncé à ce doute fondamentale qui au-delà de la science devait ouvrir la question ultime de l’en soi qui peut-être une forme de l’être laquelle pour éviter toute confusion ne contient pas l’idée d’homme. C’est l’une des ouvertures qui présentées sous cette forme prolonge un constat critique dans l’usage d’une vacuité propre au discours quant à définir les phénomènes. C’est aussi là, le paradoxe de l’usage de la langue qui ne définit rien d’autre que la première norme ontologique qui explique pour une large part une partie de nos constructions contemporaines qui a autorisé que l’on se dispense de cette question d’une connaissance pure a priori que nous appellerons matière de l’objet. Et ceci pour deux raisons la première est que la connaissance a priori porte toujours la marque de ce que nous savons pour comprendre ce que nous ne savons pas, principes, catégories, coutumes, habitudes or si l’on suppose que les choses sont ce quelles sont, elles nous obligent à orienter la pensée vers un mode d’appréhension du réel d’une autre nature que celle que nous supposons dans une forme d’unité qui serait donnée dans les objets que nous avons construits, la deuxième corrélative à la première vient du fait que l’on a construit des objets sur des objets comme par emboîtement qui hypostasient, c’est-à-dire donne une forme substantielle qui peut prendre corps dans la réalité comme étant du réel. Aussi, pour clarifier cette recherche sur les fondements de la théorie de la connaissance serons-nous conduits à préciser les différentes formes de raisonnement qui président à la construction de ces objets. C’est un premier moment de l’exposé de cette nouvelle doctrine qui doit nous conduire à formuler une nouvelle forme du matérialisme fondé sur une approche phénoménologique ce qui signifie qu’à partir d’une théorie critique de l’unification des objets de la connaissance, on se propose d’engager la vie de l’esprit sur une idée de l’unification de la matière ce qui veut dire conjointement mettre à distance méthodiquement les objets par leur déconstruction, mais aussi, poser, à côté et non pas sur cette déconstruction, les conditions de cette unification. Ce qui veut dire en définir la nature. Pour ce faire, il y a un certain nombre de difficultés à lever et d’explication préliminaire à donner afin de clarifier le propos. Nous allons esquisser un propos plus général pour préciser notre orientation. De façon commune, on a classiquement opposé ce qui est de l’ordre de la pensée à ce qui est de l’ordre de la vie comme si la considération philosophique relevait d’un principe unificateur après coup et par défaut. Or, il n’en est rien, car il se trouve que le premier obstacle à franchir tient au fait que l’on doive supposer tenir dans le même mouvement de la pensée, l’idée qu’elle peut se poser en un système qui n’est pas celui de l’objet que l’on expose. J’entends par système, non pas ce qui opère dans la philosophie hégélienne comme le point de rassemblement possible d’une philosophie, ce qui en constitue un point de rassemblement intelligible satisfaisant, car il a rendu possible la vie de l’esprit, mais il s’est replié sur lui-même en faisant de ce système une involution de la pensée comme une composition d’elle-même à elle-même. Autrement dit, la nature des choses fait bloc contre cette approche des systèmes classiques, car ils étaient dépourvus d’une part, d’une forme d’expérience et d’autre part, toujours en prise toujours avec cette idée que le sujet pensant acquis comme produit de la rationalité n’avait pas à être expliqué, il faudra attendre Husserl et les méditations cartésiennes ainsi que Searl pour voir interroger cette question du sujet. Mais cela n’aura que peu d’effet quant à supposer qu’on puisse douter que ce sujet qui n’est pas cartésien puisse produire des objets. Il ne s’agit pas de supposer, une conscience, un système ou un sujet comme préalable à cette approche, mais au contraire de les isoler comme autant d’objets justifiant une forme en soi de la matière des objets. Il s’agit là d’un raccourci communément employé pour simplifier la construction de certains systèmes contemporains qui ne trouvent pas de pertinence au point de vue phénoménologique et qui pour parier sur le seul objet et son non-sens analytique doivent lui aménager une rationalité de façade. C’est tout le problème de fond du structuralisme qui a orienté le monde vers ces objets. C’est depuis que le monde a été livré à sa propre impossibilité par ce phénomène curieux quasiment optique d’une relation de proximité intime à cet objet de fiction jusqu’à l’aveuglement. Déjà s’éloignait une forme de rationalité de la philosophie, conquise par la création de ces objets improbables et le cortège de leurs concepts dérivés. Mais les choses ne vont pas ainsi. Nous devons considérer que ce qui nous est donné à penser relève d’un libre jeu de déterminations. Ce qui veut dire que nous devons faire nos traces hors de l’empreinte de ces objets. Ce qui équivaut à dire que pas plus que de sujets, de conscience, de système ou d’objet, il n’y a de structure qui puisse expliquer notre monde et encore moins l’interprété. Ce que nous supposons être posé là devant n’a que peu de chance d’exister sous les conditions que nous imposons c’est l’une des raisons pour lesquels nous sommes aussi vides quant à mettre en forme le réel des structures, car nous savons dans notre for intérieur que nous nous accommodons d’une forme d’ignorance de notre nature. Nous sommes dans la situation d’un joueur d’échecs qui commencerait une partie d’échecs pour la continuer en une partie de dames pour finalement quitter la partie au motif qu’il n’a jamais su jouer à un jeu quelconque…c’est un peu le point auquel nous sommes rendus et peut-être ne l’avons-nous jamais quitté, une infinie reproduction du même objet démultiplié dans ses figures qui se jouent d‘elle-même, pour elle-même, en elle-même. C’est-à-dire rien. L’objet est rassurant, la matière brute des choses est inquiétante. Pour autant, c’est de cela qu’il a toujours été question. Comment cela s’exprime ? Par la considération première que nous avons évoquée qui est l’épuisement des objets sur eux-mêmes. Seuls quelques philosophes ont été à même de considérer puis consigner la forme même de cette pensée de la matière brute et le découpage des objets par la raison auquel nous sommes parvenus. Tout était du même bloc : ce qui veut dire que la théorie est une pratique parce que l’expérience est découpée par l’esprit dans la matière et ne tient pas l’extension des objets de la raison à l’écart de la nature de cette raison. Ce qui signifie que l’on ne devrait jamais trouver plus d’extension à un objet que celle qui est contenue dans sa construction, mais faute de construction raisonnable ont a abandonné des pans entiers de la réflexion au libre jeu des interprétations intempestives dont on ne devrait pas faire grand cas au point de vue de la réflexion et bien que les conséquences soient dommageables pour l‘humanité.