LA LOGIQUE

La logique dans la théorie de la connaissance s’inscrit dans le parcours d’une histoire raisonnée de la science. Historiquement, elle se constitue à l’aube de la philosophie grecque et prend un caractère formel chez Aristote au IVème siècle av. J.C. Distinguée du raisonnement, au sens d’une logique de la pensée, elle est d’abord un outil par lequel on pose des jugements. Elle ne peut, d’emblée, se situer dans le champ de la science. Elle sera d’abord perçue comme le moyen de rendre compte de l’univers et de ses objets par la pensée. C’est l’idée même d’une « machine à penser » expose par R. Lulle au XIIIème siècle. Comprendre la pensée, c’est comprendre le raisonnement. Dès lors, la connaissance scientifique au XVIIème siècle relève, soit d’une logique à la manière de Descartes (1596-1650), soit d’une logique à la manière de Leibnitz (…..), la logique s’élabore comme science quant s’y instaurent des règles de calcul : fondement de la logique symbolique, encore appelée logistique. S’est instauré depuis un débat profond entre philosophes, mathématiciens et logiciens, mettant en cause toute la théorie de la connaissance.

1 – LA LOGIQUE CLASSIQUE

Le terme logo, en grec, peut signifier à la fois, le discours, le langage, mais aussi la raison (proportion-mesure). Il peut aussi bien renvoyer aux formes du discours qu’aux constructions de la pensée. La logique chez les Grecs, en tant que discipline, se présente comme une des formes du jugement (ou proposition). Elle vise à établir des règles et à étudier les relations du discours. Celles-ci peuvent représenter soit un rapport entre des choses, soit un rapport entre deux rapports de choses. Il s’agit alors de l’énoncé d’une proportion qu’il ne faut pas entendre dans un sens numérique mais comme un rapport proprement logique : A/B = C/D se lit au sens des éléments d’Euclide : A est à B ce que C est à D. Raisonner consiste à établir des relations. On distinguera la nature des relations et l’objet des relations. Si l’on a deux propositions A et B, dire que A entraîne B nous amène autant à réfléchir sur la relation entre A et B, que sur la forme de cette relation indépendamment de A et de B. La logique s’intéresse non pas à la vérité de la pensée mais aux conditions de vérité (validité) du raisonnement. D’une manière générale, la logique est l’étude des lois qui régissent le raisonnement d’après une méthode qui tente de le décrire selon les règles déterminées.

A- La logique : un art du raisonnement :

La logique n’est pas d’emblée à situer dans le champ de la science. Elle a d’abord été pensée comme un art du raisonnement. On distingue dans la logique classique, la logique des propositions et la logique des prédicats (de premier ordre et second ordre). Il y aurait en quelque sorte une logique « élémentaire » et une logique « supérieure ». « On pourrait dire que la logique des propositions est la théorie la plus générale que l’on puisse concevoir : celle d’un univers dont les éléments tenus provisoirement pour ultimes parce que non analysées, sont des faits indiqués par des propositions. La logique des prédicats serait alors la théorie plus complexe d’un univers caractérisé par l’existence d’objets (désignés par des termes), supports de propriétés et de relations (signifiées par des prédicats) (Ruyer). La logique des prédicats est une extension de la logique des propositions. Elle introduit de nouveaux éléments dans l’écriture des relations (symboles et quantificateurs) mais les règles en sont les mêmes. Par son essence, dès l’origine, la logique vise donc à rendre compte des conditions mêmes de l’existence des objets pour la pensée.

a)- Les origines : Il s’agit ici de rappeler les éléments fondamentaux qui constituent les règles et les principes de la logique. Ces règles et ces principes seront autant de principes de raisonnement que des critères philosophiques de l’usage de la raison. C’est notamment l’usage qu’en fera Kant dans la « Critique de la raison pure » pour construire la déduction des catégories de l’entendement. C’est dans cet esprit que la logique moderne, par rapport à la logique classique, qui étudiait le langage, établira non plus des rapports construits à l’image des règles d’une grammaire entre les objets mais des ensembles de relations entre des propositions. A l’origine, la logique classique se divise en une logique des prédicats et la logique des propositions. La première est représentée par la tradition aristotélicienne et se déploie selon des règles et des lois dont la théorie a été donnée par Aristote (384-322), d’une part dans les « premiers analytiques » où il expose la théorie du syllogisme et, d’autre part, dans les « seconds analytiques » où il élabore la théorie de la démonstration. La seconde est représentée par la logique stoïcienne, fondée par Zénon de Citium (336-265) et Chrysippe (277-204), qui reprenant la théorie du syllogisme d’Aristote en dégagent une structure du raisonnement.

b- Les principes : La logique énonce les principes de construction des règles du raisonnement (règles d’inférence ou de déduction) ; ils sont au nombre de trois :

1 – Principe d’identité : « Ce qui est, est ». Ce premier principe est important car plus large qu’il n’y paraît dans l’histoire de la logique. On peut en étendre la réflexion à des expressions comme A = A. Une proposition du type A = A est toujours vraie quelque soit A : c’est une tautologie.

2 – Principe de non-contradiction : « deux propositions contradictoires (p et non p) ne peuvent être simultanément vraies »

3 – Principe du tiers exclu : « de deux propositions contradictoires, si l’une est vraie, l’autre est fausse ».

Sur ces principes fondamentaux, la logique se construit et fonde l’art du raisonnement dont l’une des constructions des plus élaborées se trouve dans la théorie du syllogisme d’Aristote. Quels sont les éléments de la logique d’Aristote ?

c – Le raisonnement chez Aristote : Aristote distingue le raisonnement de la démonstration, en effet, dans les premiers analytiques il établit : « que si le syllogisme est une sorte de démonstration, tout syllogisme n’est pas une démonstration ». La démonstration, pour sa part, se fait à partir de principes universels selon une induction de cas particuliers. On ne peut dès lors confondre le raisonnement et la démonstration.

d – La théorie aristotélicienne du syllogisme : Le syllogisme est un raisonnement qui porte sur des propositions constituées par des termes (sujets et prédicats), et par la copule « être » qui met ces termes en relations. Une proposition du type : « Les hommes sont mortels », qui est considérée comme un jugement, est composée d’un sujet (les hommes), d’un prédicat (mortels) et d’une copule (sont). Un syllogisme est composé de trois propositions (deux prémisses et une conclusion) ainsi construite : « tous les animaux sont mortels ». Il y a deux prémisses formant la majeure, la mineure et leur conclusion. La définition du syllogisme selon Aristote est donc la suivante : « un discours dans lequel, certaines choses étant posées, quelque chose d’autre que ces données en résulte nécessairement par le seul fait de ces données ». Parmi tous les syllogismes, Aristote distingue les concluants (respectant les règles de la démonstration), de ceux qui ne le sont pas, les sophismes. Le sophistique, chez les Grecs (Vème s. avant J.C.) représenta un courant de pensée des sophistes dont Platon, par l’intermédiaire de Socrate, réfuta les thèses dans certains de ses dialogues (Protagoras et Gorgias). A l’art du raisonnement trompeur sophistique, où l’homme de Protagoras « est mesure de toute chose », Platon opposait l’idée d’une vérité universelle dont Aristote se fera l’écho dans sa théorie du syllogisme.

B – LA LOGIQUE SCOLASTIQUE – La Logique médiévale : une nouvelle réflexion sur la logique La logique scolastique au XIIIème siècle introduit une nouvelle construction appelée « la logique moderne ». On constate alors que toute proposition du type « les hommes sont mortels » contient une implication (homme implique homme mortel). L’analyse de ces relations internes au contenu des propositions s’appellent : la théorie des conséquences. Une « conséquence » : est une proposition composée d’un « antécédent » et d’un « conséquent » liés par une « implication ». Les termes contenus dans les propositions supposent donc, selon G. d’Ockham, une réflexion sur le sens des noms et des concepts : « un mot tient lieu conventionnellement de la chose qu’il signifie ». Les conséquences se fondent sur une connaissance intuitive, laissant entendre qu’une chose est inhérente à une autre. Dès lors, si l’on dit « Socrate est réellement blanc », la blancheur et Socrate sont des connaissances intuitives et la relation « Socrate est blanc » est inhérente à la blancheur de Socrate. Elle est par conséquent considérée comme universelle. De la logique scolastique émerge l’idée d’un fondement logique de la connaissance universelle, c’est une didactique : elle sert à apprendre à apprendre. On établit avec la logique scolastique que les propositions sont complexes et possèdent un contenu, qui peut lui-même se définir en termes de proposition. C’est tout l’art du raisonnement qui est en cause pour définir une approche universelle du système de la connaissance au regard de celui de la raison.

2 – LA LOGIQUE MODERNE :

Le projet aristotélicien de l’étude formelle du raisonnement accomplit avec la logique moderne un pas décisif. Celle-ci se propose, d’une part d’établir un langage (symbolique) qui par son universalité doit rendre compte de la nature même de toutes propositions et, d’autre part, de s’édifier sur ce langage selon des règles qui doivent être elles-mêmes clairement définies (formalisme). C’est toute l’essence d’un système formel qui est contenu dans ce projet dont le premier moment est dans l’idée d’une « langue universelle des calculs ».

A – La logique ou l’art de penser : Le nominalisme et la scolastique médiévale avaient amené à distinguer les propositions et le contenu des propositions dans la théorie des conséquences. Ce fut la première recherche sur un « art de penser » construit à partir d’une logique des relations dans les propositions. Cette construction de la logique ouvrait une nouvelle approche de la connaissance : toute connaissance devrait pouvoir s’écrire en un système logique de propositions, selon un projet que l’on trouve déjà en œuvre chez R. Lulle (1235-1315). Ce projet médiéval fut repris dans un premier temps par « la Logique de Port Royal » au XVIIème siècle, connue sous le nom de « logique d’Arnault et Nicole». Celle-ci constitue un traité de « l’art de penser » dans lequel, reprenant la théorie du syllogisme d’Aristote, on tente de décrire les raisonnements qui figurent dans les thèses et les propositions constituant les différentes sciences de l’époque. Cette logique, encore en prise avec une théorie de la connaissance et du langage, interroge la possibilité d’un contenu universel des propositions qui donnerait le sens profond et unifié de l’ensemble des connaissances, selon le rapport entre les mots et les choses.

Leibnitz : un projet de langue Universelle C’est à Leibnitz que l’on doit le glissement du projet vers une symbolique de l’expression. Il reprend en effet, d’une part le projet d’une combinatoire universelle (logique des relations) mais aussi celui d’un langage des calculs. On doit pouvoir écrire des propositions uniquement avec des symboles, comme l’on peut décrire la vitesse d’un corps selon un rapport de type purement mathématique. En ce sens, Leibnitz (1646-1716) est le premier à introduire l’équivalence entre les écritures suivantes : A+B correspond à A ou B, AxB correspond à A et B, les premiers connecteurs logiques sont alors établis et l’on entre dans la logique symbolique de la logique moderne.

B – La Logique symbolique La logique moderne consiste à établir des relations formelles entre des objets pensés et leur expression logique : elle utilise la logique pour réfléchir la logique ouvrant par là même le champ d’une recherche autonome, dès lors elle devra aliéner par ses propres méthodes des concepts de la philosophie ou des mathématiques : c’est tout le sens de la métalogique, laquelle suppose par extension le recours à une théorie (métathéorie) et à un langage (métalangage). La logique moderne, se divise, elle devient plurielle, se divise en logique des propositions, logique des classes et logique des relations. Celles-ci supposent, pour spécifier leurs objets, un langage symbolique et un formalisme. Le langage symbolique est établi dans sa forme par Euler (1707-1783), Bolzano (1781-1854) et G. Boole (1815-1864). Ce dernier introduit la notion de classes afin de fonder un rapport formel entre les objets et la pensée, une classe correspondant à une collection d’objets : c’est un calcul sur des signes algébriques qui symbolise les classes et les opérations sur des classes. La logique des classes fut reprise par C.S. Pierce (1839-1914) et E. Schröder (1841-1902)

- Le sens d’un projet : Décrire un objet selon la logique, en terme symbolique, devait-il permettre d’expliquer formellement au sens de la raison, à la fois l’existence et la nature de l’objet ? Si c’était le cas, alors la logique permettrait de démontrer l’essence même des mathématiques, voire de tout raisonnement. C’est une adresse ouverte par les logiciens au champ des mathématiques et de la philosophie. La logique s’enrichira d’un nouveau débat lorsqu’il s’agira de avec G. Frege (1848-1925) d’introduire sous sa forme syllogistique le calcul des propositions et de poser le rapport entre l’axiomatique (déduction formelle à partir d’axiomes considérés comme vrais) et la sémantique (étude de la signification des propositions). Il tentera d’établir le rapport entre l’arithmétique et la logique pour construire les fondements logiques de l’arithmétique. Ce problème trouvera sa solution chez K. Gödel (1906-1978) grâce à son arithmétisation de la syntaxe, mais par là même sera engendré une ligne de fracture entre deux courants, l’un dit axiomatique, l’autre dit intuitionniste.

3 – LOGIQUE ET MATHEMATIQUES

Avec les travaux de G. Frege (1848-1925), c’est le fondement logique de l’arithmétique et des mathématiques en général qui est questionné. C’est aussi le sens d’une rupture épistémologique lorsqu’il introduit sous sa forme logistique le calcul des propositions et pose la question du rapport entre l’axiomatique et la sémantique. De là naîtront un certain nombre de paradoxes et plusieurs courants de pensées. A l’origine se trouve Bertrand Russell (1872-1970) : «Principia Mathématica » (1910-1913) qui établit que les mathématiques doivent considérés comme une branche de la logique : le logisisme et le formalisme peuvent être ramenés à un nombre minimum d’axiomes et de termes. C’est à lui que l’on doit la théorie des types. Cette axiomatisation trouve son développement avec E. Zermelo (1871-1953) dont l’histoire a retenu l’axiome du choix dit le « le choix de Zermelo » (affirmant qu’étant donné un ensemble d’ensembles il existe un ensemble) ayant pour élément un représenté par Brouver et Heyting qui remettent en question le tiers exclus et proposent un système à plusieurs valeurs de vérités.

1 – LA NATURE DU CALCUL

- Principe du calcul propositionnel Le calcul des propositions au sens moderne, sera l’art d’établir des relations entre des expressions indépendamment de leur contenu et selon un système d’axiomes qui permettra de décider de leur validité. Les notions établies précédemment de classe, de relation et de proposition deviennent des cas particuliers de la notion de prédicat. Que devient alors un calcul logique ? Dans ce débat, le calcul logique est ramené à un calcul algébrique voire arithmétique selon K. Gödel (1906-1978), sur les objets pensés ou sur les mathématiques (métamathématiques) : c’est tout l’enjeu du débat entre mathématiques et logique. Ainsi la notion de métalangage est introduite par Hilbert (1862-1943) pour parler d’un langage « qui parle des mathématiques sans en être ». La métalogique donne à la logique un instrument d’analyse d’elle-même et lui permet d’accéder à la rigueur mathématique. Les propositions sont construites indépendamment de leur contenu selon le calcul formel.

- Le sens des règles entre philosophie et mathématiques : Les règles d’écriture des propositions correspondent à la formulation des expressions et règles d’inférences tout en permettant la transformation des expressions au cours d’une démonstration. On se forge un outil logique permettant d’écrire un raisonnement, d’expliquer ses transformations et de distinguer deux caractères essentiels dans la conduite de ce raisonnement, sa vérité et sa démontrabilité (validité). La vérité n’étant plus une garantie logique, seule la démonstration qui pourrait se démontrer elle-même par ses fondements serait la garantie formelle de l’unité d’une théorie ou d’une pensée, fût-elle d’ordre philosophique ou mathématique. Tel semble bien être le sens d’un système axiomatique.

- Qu’est ce qu’un système axiomatique ? L’axiomatique consiste à établir un certain nombre de propositions pour fonder une théorie. Ces axiomes doivent être consistants « l’on ne peut y démontrer en même temps une chose et son contraire », complets « si et seulement si, quelle que soit la proposition, l’on est toujours en mesure de décider si elle est vraie ou fausse », indépendants « non déductibles les uns des autres ».

II – VALIDITE ET VERITE

- Validité : le théorème de Gödel On peut, à partir des axiomes et des règles d’inférences construire des démonstrations dont la valeur de vérité est indépendante du calcul formel : la validité d’une proposition résidera en sa démontrabilité et son caractère de vérité sera ainsi nécessairement établi. L’essence même de la vérité glisse en quelque sorte dans l’explicite de la démontrabilité et n’est plus une affirmation extérieures ou implicite à la nature du raisonnement. Les travaux de K. Gödel en 1931 ont amené philosophes et mathématiciens à réfléchir ces notions notamment, lorsqu’il établit un nouveau résultat en exhibant une proposition vraie mais non démontrable. Tout un courant se développe alors pour réfléchir la dualité : validité et vérité.

- Science et vérité : Partant du fait qu’il n’y a pas de progrès scientifique si l’on admet pas que toute théorie est provisoire, comment peut-on avoir recours à l’idée d’une vérité absolue de la théorie dès lors qu’elle est provisoire ? Il nous faut introduire l’idée, selon K. Popper, qu’il y aurait des degrés de proximité à la vérité sans connaître la vérité absolue. Selon lui, une théorie serait plus proche de la vérité qu’une autre, d’une part, elle montrerait tous les phénomènes inexpliqués par la précédente et d’autre part, elle rendrait compte de ceux-ci selon différents degrés de vérité. Cette vérité se nomme la vérisimilitude.

- Vérisimilitude : Une théorie présente une vérisimilitude supérieure à une autre, quand elle rend compte de la totalité des phénomènes expliquée par l’autre théorie et que de surcroît explique les phénomènes que l’autre théorie ne parvient pas à faire. D’une manière générale, le faux ne peut-être pensé comme le contraire du vrai. Il renvoie, dans la théorie de la logique, soit à l’essence même de la fonction de vérité distinguée de la validité, soit dans l’essence même du faux dans la science, c’est l’une des conditions de sa progression au sens d’une erreur rectifiée. Réfutabilité et falsifiabilité ne peuvent être confondues chez K. Popper dans l’approche critique des théories. C’est toute la difficulté de l’interprétation du raisonnement moderne comme celui du probabilisme lié à la question du déterminisme dans la physique quantique.

DES AXIOMES AUX PARADOXES - Différents systèmes : On trouvera différents choix d’axiomes mettant en cause autant les principes fondamentaux de la logique, notamment celui du tiers exclu, que ceux de critères comme celui de la valeur de vérité par la mise en évidence de propositions ni vraies, ni fausses, Heying établit, en ce sens, une logique à partir des travaux mathématiques de Brouwer, lesquels supposent la recherche mathématique ouverte à de nouveaux concepts (intuitionnisme) et s’opposent à l’idéalisme platonicien pour lequel les mathématiques sont la reconstitution d’une connaissance déjà acquise (réminiscence), alors que les logiques dites modales vont introduire un nouveau type de calcul à partir de nouveaux opérateurs. On passera d’une logique bivalente (deux valeurs) à des logiques plurivalentes (n valeurs). Dans ces logiques, l’on peut avoir une proposition nécessairement vraie, une proposition nécessairement fausse et une proposition « ni vraie, ni fausse ». Lukasiewicz généralisera ce principe en introduisant n valeurs entre 0 et 1.

- Les limites du formalisme La méthode axiomatique issue des travaux de Hilbert sur les fondements de la géométrie d’ Euclide donne un système d’axiomes complet à cette géométrie et permet de formuler le problème de la non contradiction des mathématiques : « l’axiomatique permet d’embrasser d’un seul coup toute une théorie ». Par cette application et ces résultats, « comprendre une théorie sera considérer ses principes puisqu’ils sont entièrement définis ». Ce que Hilbert établit pour la géométrie de Péano (1858-1932) le fait pour l’arithmétique. Ainsi un rapprochement pouvait être entrepris entre le formalisme logique et l’axiomatique mathématique : pourrait-on rendre compte de l’existence d’un objet par lui-même ? Dès lors, on devrait pouvoir écrire rigoureusement la consistance et la complétude d’un système formel. Il faillait, à partir de ces éléments, essayer de formaliser des problèmes multiples qui persistaient autant en mathématiques qu’en logique.

- Une mathématique contradictoire C’est notamment le problème posé dans « la théorie des descriptions » et dans « la théorie des types » de B. Russell (1872-1970). Dans cette dernière, il est mis en évidence des paradoxes bien connus, tel « le paradoxe du bibliothécaire » : il existe dans une bibliothèque deux types de catalogues qui s’incluent eux-mêmes dans leur liste et ceux qui ne s’y incluent pas ; si l’on veut faire le catalogue de tous les catalogues, celui-ci doit-il se mentionner lui-même ? En termes d’ensembles cela signifie : existe-t-il un ensemble de tous les ensembles ? Telle était bien la question au cœur de l’axiomatique. Reprise par Hilbert utilisant les résultats de Péano, elle amène au « théorème de Gödel », déjà évoqué sur la consistance des systèmes axiomatiques, que l’on pourrait traduire par la recherche de la limite interne de la formalisation d’un problème. Ce théorème établit que la non contradiction mathématique ne pourra jamais être établie.

- Pensée formelle et pensée logique L’application des systèmes formels en informatique introduit de nouveaux rapports entre la logique et les mathématiques par des nouveaux rapports entre la logique et les mathématiques par l’intermédiaire de la notion de programme. Le programme est à la fois un langage et une théorie dont on doit rendre compte par la théorie de l’information. En ce domaine, les recherches formelles ont été introduites par A.M Türing (1912-1954), lequel a donné les règles des notions d’algorithmes et de calculabilité, reprenant les résultats de K. Gödel. Toute information peut-être considérée comme une proposition et sa calculabilité se définit comme sa démontrabilité par la machine. A la suite de ces travaux, le débat moderne connaît d’autres applications et recherches avec les travaux de Gentzen (1906-1945), conciliant d’une part, le formalisme de l’Ecole de Hilbert et d’autre part, l’intuitionnisme de l’Ecole de Brouwer. L’introduction des systèmes formels avait permis d’appréhender les démonstrations pour dépasser une causalité mécaniste à la manière de la mathématique universelle de Descartes et fonder une causalité logique vérifiable à l’aide de « machine à démontrer », c’est là tout le sens des applications de la logique à la programmation informatique. C’est dans cette même perspective que la « logique floue » (logique possédant un nombre infini, continu, de valeurs de vérité) fût élaborée. Ce résultat, parfois oublié, est remis à jour par les recherches sur l’intelligence artificielle où l’on tente de formaliser les calculs que l’on peut effectuer à l’aide d’une machine (ordinateur).